Afflux sans précédent dans les sections socialistes : les nouveaux adhérents, autorisés à s'inscrire pour la cotisation réduite de vingt Euros jusqu'en juillet pour avoir le droit de voter aux primaires du PS, ont jusqu'au 27 septembre pour faire valider leur adhésion en se présentant "aux camarades" et en faisant voter leur adhésion par chaque section.
A Sèvres, c'est un raz-de-marée : ils sont venus, ils sont tous là, les nouveaux adhérents, y compris ceux qui étaient venus se présenter avant l'été et sont déjà intégrés. La section compte aujourd'hui plus de 150 adhérents, annonce triomphalement le secrétaire de section, Jacques Blandin. Les nouveaux sont donc venus mardi soir, et il a même fallu prévoir une séance de rattrapage samedi prochain pour ceux qui ne pouvaient pas venir, d'autant que le local de section est plein à craquer. Le réseau de Ségolène Royal, Désirs d'avenir, a envoyé des courriels pour rappeler aux nouveaux adhérents d'aller faire valider leur adhésion au PS. Sans doute les autres candidats ont-ils fait de même, notamment chez DSK et Fabius.
Chacun se présente et, fait remarquable, s'il y a des anciens qui "reviennent" au parti, comme ils le disent, la moyenne d'âge tombe de façon spectaculaire avec des jeunes qui viennent pour la première fois à la politique, pour "changer les choses", comme ils l'expliquent maladroitement. On s'échange des coups d'oeil nostalgiques : ça rappelle les années Mitterrand, avant 1981... Tous les nouveaux sont accueillis par acclamation, d'autant plus facilement que pas un n'osera déclarer qu'il vient pour soutenir tel candidat ou telle candidate, alors que chacun sait qu'ils ne viennent que pour ça.
Mais au-delà de la prudence des néophytes, le consensus n'est pas seulement de façade, et c'est peut-être l'autre nouveauté encourageante. Si les mouvances traditionnelles (rocardiens, mitterandistes, anti-libéraux), déjà sérieusement bousculées depuis 2002, ont aujourd'hui éclaté entre les différents candidats, il semble y avoir un désir, comme à Lens samedi dernier, de préserver une unité vis-à-vis de ce qui est ressenti comme le danger commun, la montée du sarkozisme.
Illustration frappante : la députée européenne Pervenche Bérès, militante de Sèvres très chahutée dans la section lorsqu'elle a pris le virage fabiusien de soutenir le "non" au référendum européen, est venue ce soir commenter la présidence allemande de l'Union européenne et ses implications sur le débat électoral français et sur la future présidence française. Elle est écoutée dans un silence amical, on sent que la cicatrice entre "ouistes" et "nonistes" est en train de se fermer.
Le secrétaire a mis en garde l'assistance, en lui donnant la parole : "ce soir, on ne va pas refaire le débat sur le référendum". Le souvenir est encore récent des bagarres de l'année dernière... Mais c'est inutile, pas d'envie de chahut chez les camarades sévriens, surtout pour écouter le vibrant plaidoyer européen de Pervenche : "aucun problème politique ne peut être résolu", dit-elle à propos du débat des présidentielles, "si nous n'intégrons pas la dimension européenne". En 2002, ajoute-telle, au-delà du bilan du gouvernement Jospin "qui nous honore, nous étions en déficit sur l'Europe", ce qui a selon elle pénalisé les socialistes.
"Il est de notre devoir à tous de rappeler que cette question européenne doit être au coeur de notre projet", mais en allant plus loin car il faut passer avec les Français "un contrat clair sur les enjeux européens", dès avant les élections et non pas après. Et elle ajoute avec un sourire : "on est encore tous ensemble, on peut débattre entre nous, il y a un an on n'en était pas là, nous avons aujourd'hui une bonne base pour nourrir le débat sur l'Europe".
Sèvres est peut-être un peu à part, avec un ancrage européen particulier résultant de la présence dans la commune d'un lycée international, avec des associations franco-allemandes actives. Mais le climat constaté au cours de ce débat est peut-être révélateur d'une nouvelle maturité du PS et d'un renouvellement en profondeur de ses militants. Encourageant pour l'avenir.
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