Le reportage militaire est enfin arrivé au stade du "vécu de l'intérieur", par immersion dans la communauté militaire, et c'est ce qu'a fait pendant six semaines, au printemps dernier, le réalisateur Yves Bourgeois qui, spécialiste de la marine, a vécu la vie quotidienne à bord du porte-avions Charles De Gaulle.
Six semaines en opérations avec la marine française dans l'Océan indien, en soutien des forces aéro-terrestres françaises engagées en Afghanistan, une immersion assez profonde pour que ce réalisateur, devenu un intime de l'équipage, nous en ramène le discours le plus profond, le plus confidentiel, les tripes du porte-avions.
Son reportage, en plein cours de montage, s'appellera donc tout naturellement "Confidences d'équipage" lorsqu'il sera diffusé sur Thalassa au début de l'année prochaine. France 3 offrira ainsi au téléspectateur le témoignage le plus vrai, le plus réel, sur la vie d'un porte-avions, comme Arte est en train de le faire de son côté sur la vie à bord des sous-marins nucléaires.
A l'occasion du salon Euronaval, Yves Bourgeois a pu montrer quelques images, une sélection de rushes, aux opérationnels dont le chef d'état-major de la marine, qui a été ému de la qualité des témoignages recueillis. Car le réalisateur, qui a tourné 42 heures d'images et enregistré séparément 32 heures d'interviews, de son et de bruits d'ambiance, a pris soin de ne faire parler que l'équipage lui-même, sans jamais un seul mot de commentaire.
"Ce sont des marins dans leur jus, et des pilotes dans leur jus", a commenté sobrement, mais avec émotion, l'amiral Oudot de Dainville, lui-même ancien pilote d'aéronavale. La tension de ces hommes et des femmes, tous également concentrés dans cette projection de force qui se résume au catapultage d'un appareil pour une mission lointaine, avec un risque partagé par tous, est perceptible à chaque instant, dans toute son intensité.
Pilotes et équipages de Super-Etendard, de Rafale Marine - vraie vedette du film, totalement intégré dans son environnement et très spectaculaire dans ses catapultages et appontages - , d'avion-radar, d'hélicoptères, tous sont décrits dans leur cadre naturel, leur cockpit, leur cabine.
Le réalisateur leur a prêté des caméras numériques haute définition testées pour Sony, et les images réalisées sur le pont du porte-avions par l'équipe sont montées en vis-à-vis ou en contrechamp des images tournées par les pilotes eux-mêmes, ce qui constitue sans doute une première. Car la technologie de ces nouveaux caméscopes HD leur permet de tourner sans aucun apport de lumière, avec un rendu total des ambiances opérationnelles.
Ce blog étant libre de toute publicité, je ne suis pas en train de vendre une marque de caméscope. Mais je suis impressionné du saut qualitatif et de ce que cela représentera demain pour les JRI, les journalistes reporters d'image, qui pourront disposer d'un matériel THD leur donnant une qualité équivalente au film 35 mm pour le poids d'un caméscope amateur.
Quant à cette co-production de France 3 et de l'agence Atom, j'attends avec impatience de voir le produit monté et fini, ce sera très certainement un Thalassa exceptionnel, à ne pas rater ! Yves Bourgeois est en tout cas apprécié de la Marine nationale, avec laquelle il a réalisé plusieurs documentaires dont Le Mystère de Vanikoro, une enquête sur la disparition de l'expédition Lapérouse au 18e siècle.
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