Je l'avais lu dans les journaux, je voulais le vérifier pour de vrai : mardi soir, la réunion de la section du PS de Sèvres a fait le plein comme jamais pour le démarrage de la campagne des "primaires", qui doit aboutir fin novembre au choix du candidat socialiste aux présidentielles de 2007, c'est bien une vague de fond qui est en train de se former.
Près de soixante-dix personnes s'entassaient dans le local, militants anciens, militants "à vingt balles", jeunes et vieux, Sévriens et habitants des communes limitrophes. Le renouvellement de la base militante est une réalité et pas simplement des cyber-promesses d'adhésion ou des cartes postales de soutien. Près de soixante-dix personnes alors qu'en temps normal, la section affichait plus souvent la quinzaine pour ses réunions de quartier. Et c'était bien une réunion d'adhérents ayant accompli toutes les formalités préalables à l'adhésion, démarche individuelle, présentation, vote par la section, et non pas une simple réunion de sympathisants...
On attendait l'affrontement entre les partisans des trois candidats restés en lice, Ségolène, Dominique et Laurent. Ceux qui s'attendaient au pire en ont été pour leurs frais : grâce à l'action modératrice de Jacques, le secrétaire de section, on a assisté en fait à un débat contradictoire mais serein, animé mais respectueux des différences, avec une satisfaction partagée par la plupart de se sentir à nouveau plus forts parce que plus nombreux, un sentiment qu'on n'avait pas ressenti "à la base" depuis longtemps.
Alain représentant Fabius, Jean-Christophe représentant Ségolène, Patrick représentant DSK, chacun a expliqué son choix, avec un talent variable mais beaucoup de spontanéité, puis exposé ce qui différenciait son candidat. Force a été de constater que tous les trois s'appuyaient sur le même programme du PS et que, au-delà de la sympathie subjective pour tel ou tel, le choix objectif sur des critères rationnels était particulièrement difficile. Peut-être un peu plus d'européen ici, d'économie de marché par là, de social chez le troisième, mais honnêtement, les différences sont plus une matière de dosage.
Débarquant de son Thallys depuis le Parlement européen de Bruxelles et arrivant donc en retard, la députée européenne Pervenche Bérès, militante sévrienne active, s'est fait un peu chahuter en se lançant dans un long panégyrique de Laurent : c'est déjà fait, lui a-t-on lancé, son représentant a déjà parlé ! Presque formaliste, la section s'est en effet appliquée une stricte discipline de parole entre les trois candidats - on ne peut pas parler de courants. Chacun a fait du reste circuler une liste d'adhésion à un comité de soutien spécifique.
Tout n'est pas joué pour autant. Plusieurs néo-adhérents - dont en réalité certains revenaient pour la deuxième ou troisième fois au PS - ont déclaré ne pas s'être encore fixés sur un candidat, contredisant ceux qui pensaient que tous les nouveaux étaient automatiquement Ségolistes. D'où l'intérêt de cette phase de débats qui va durer quelques courtes semaines et permettra à tous de faire leur choix.
Une question sur la validité discutable des sondages, lancée par un Fabiusien frustré justement du fait que son candidat est distancé nettement dans les sondages, a permis un débat sans polémique, les Strauss-kahniens rappelant la valeur relative de l'outil statistique des sondages, et les Ségolistes soulignant que les sondages importants étaient ceux qui opposaient la gauche à la droite. Quant aux sondages opposant les candidats socialistes entre eux, tout le monde a été d'accord pour dire que les organismes de sondage ne pouvaient pas sérieusement savoir comment allaient se reporter en interne les sympathies des militants.
Pas d'attaques personnelles, pas de sous-entendus, plus de querelles entre les "ouistes" et les "nonistes" du référendum européen de l'année dernière. Mais au contraire une cohésion nouvelle concrétisée par un engagement fort : chacun des représentants s'est engagé, à titre personnel, à voter au printemps pour celui qui serait désigné par le parti en novembre, même si ce n'était pas encore son candidat.
Par contraste avec ce qui se passe à droite mais en fait dans l'ensemble des autres partis politiques, le Parti socialiste a réussi en très peu de temps, notamment depuis la réunion de Lens, à se mettre en ordre de bataille pour ces présidentielles avec une maturité et un dynamisme qui impressionnent et sont prometteurs pour la suite. Notamment parce que, comme je l'ai vu à la section de Sèvres, les militants sont déjà pressés d'en avoir fini avec les primaires pour se lancer tous ensemble dans l'autre, la vraie bagarre, celle contre le candidat Sarkozy.
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