C'est fait, le parti socialiste (PS) français a donc abandonné le grand soir, la tentation révolutionnaire, pour se ranger sous la bannière réaliste "d’une économie sociale et écologique de marché". Autant dire qu'il a troqué le poing levé, à peine tempéré par la rose, pour un café-crème avec croissant.
Dans le texte publié il y a quelques jours par Le Monde (mais classé depuis dans les archives payantes du quotidien, et disponible gratuitement sur Rue89), le nouveau PS a donc fait son consensus en faveur d'une "économie de marché régulée par la puissance publique, ainsi que par les partenaires sociaux". Le système voulu par les socialistes est désormais "une économie mixte, combinant un secteur privé dynamique, des services publics de qualité, un tiers secteur d’économie sociale".
J'arrête là la citation d'un texte qui, pour être plus digeste que le "Capital" de Karl Marx, indique bien que la prochaine étape pour le parti est logiquement de renoncer à son qualificatif de socialiste, historiquement entaché de dévoiements et dont il laissera l'expérimentation plus ou moins réussie à Cuba et à la Corée du Nord, où la frontière entre communisme et socialisme n'a jamais permis d'arriver à la social-démocratie. Mais celle-ci était-elle viable, a-t-elle jamais existé, le socialisme était-il compatible avec la démocratie ? Trop de temps perdu à chercher la réponse...
Alors, Parti travailliste ? Parti social-libéral ? Parti démocrate ? L'Italie vient de payer très cher le fait pour la gauche de s'être fondue en un "PD" déstructuré, abandonnant toute référence à l'idéologie alors que la droite conservatrice et libérale faisait triompher ses valeurs. Walter Veltroni et son "bonisme" ont échoué à rassembler l'électorat, pendant que les valeurs idéologiques les plus réactionnaires et xénophobes de la Ligue lombarde emportaient la décision au profit du "Peuple des libertés" de Silvio Berlusconi. La France n'a pas fait autre chose en laissant le libéralisme triompher par défaut et seule l'Espagne, aujourd'hui en Europe, triomphe encore sous les couleurs du socialisme ouvrier, affiché dans le PSOE, le parti socialiste ouvrier espagnol. Zapatero l'anti-confirmiste, le laïc militant, pourfendeur de la violence conjugale et de l'homophobie, a parfaitement su maîtriser la croissance économique d'une Espagne très en forme sans renoncer en rien aux idéaux affirmés de la gauche.
Le débat n'est pas que de façade ou d'étiquette. Dans la lutte des éléphants - les vieux et les jeunes - au PS, les clivages restent très forts. Ségolène Royal a tendu trop tôt la main aux centristes de Bayrou, elle a été désavouée par son propre électorat. D'autres continuent à prêcher un discours "d'union de la gauche" alors que le parti communiste a littéralement disparu. Seul gardien du temple, qui n'a pas encore sacrifié à la mode du "bonisme", de la démocratie participative ou du "gauchisme", François Hollande reste le porte-parole d'un parti qui n'ose plus dire son nom. Sa faiblesse deviendrait-elle une force ? Certains commencent à se demander si sa force d'inertie ne serait pas finalement le meilleur rempart contre les dérives "veltronistes"...
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