La notion de leadership, évoquée dans mon premier billet, est celle qui fait le plus problème aujourd'hui au parti socialiste, du fait essentiellement d'une regrettable confusion entre le premier secrétaire, chef du parti, et le candidat potentiel aux élection présidentielles, et ceci quelle qu'en soit l'échéance. Confusion dont j'expliquais qu'elle venait d'une mauvaise lecture des institutions et de l'acceptation passive d'une dérive présidentialiste toujours plus marquée.
Mais une autre cause de la faiblesse structurelle de la direction du PS provient du culte un peu excessif de l'unanimisme, assorti d'un sens tout aussi excessif du pardon des offenses, qui aboutit à ce que chacun peut se permettre à peu près ce qu'il veut dans le parti et même au nom du parti sans jamais en payer le prix politique, sans rencontrer de sanctions d'aucun type - les exclusions restent exceptionnelles et n'ont pas du reste également frappé les transfuges vers la majorité présidentielle actuelle.
Unanimisme mal compris, cette tendance du premier secrétaire sortant à vouloir ménager tous les courants, donc leurs chefs de file, en acceptant toutes leurs rebuffades alors mêmes que celles-ci affaiblissaient la vie du parti : le PS ne s'est jamais remis de son échec au référendum européen, précisément parce qu'après avoir effectué un référendum en interne, qui avait donné une large majorité au "oui", il a été permis à un courant, celui de Laurent Fabius, de faire comme si ce référendum interne n'avait pas eu lieu et de continuer à militer isolément contre la constitution européenne. L'unanimisme de façade n'a permis au PS de conserver ni sa cohésion interne, ni sa crédibilité à l'extérieur, gravement érodée après cet échec.
La campagne de 2006-2007 pour les présidentielles a donné lieu aux même tergiversations. Malgré l'organisation de primaires pour désigner son candidat officiel, le parti a continué ensuite à s'agiter de façon dispersée. Comme le bilan de cet échec n'a jamais été tiré de façon honnête, il est possible de dire qu'une partie de l'échec est imputable à la candidate qui n'a pas vraiment joué le parti, en s'appuyant sur ses réseaux externes et en nouant des alliances tactiques hors du PS, mais une partie aussi importante est imputable à la direction nationale qui n'a pas su ou voulu mobiliser le parti tout entier pour soutenir sa candidate.
Là aussi, l'erreur reste structurelle, et quand la droite peut affirmer que si des présidentielles étaient organisées demain matin, Nicolas Sarkozy les remporterait encore plus facilement, il est malheureusement possible de compléter le tableau en disant que le PS repartirait à la bataille en ordre dispersé, comme s'il n'avait rien compris ou rien appris. Et s'il peut y avoir des motions de synthèse lors d'un congrès - ce sera certainement le cas au prochain à Reims - il ne peut malheureusement y avoir de candidat de synthèse, et cette incapacité du PS à accepter qu'un individu s'impose aux autres est une faiblesse rédhibitoire.
La lecture en diagonale des contributions, par ailleurs très inégales, ne permet pas encore de faire ce tri, cette sélection d'un leader évident, indépendemment de la notion même de candidat aux présidentielles. Et l'idée qu'il puisse y avoir un prochain premier secrétaire qui ne soit que le gérant de la boutique et non pas le chef d'une future majorité alternative est assez incongrue. Bien avant Sarkozy, qui a mené une stratégie à long terme de conquête de l'UMP avant de se présenter en candidat d'une parti entièrement mobilisé derrière lui, François Mitterrand avait montré que la même chose était possible à gauche, sans du reste renoncer au débat des courants.
L'urgence n'est donc pas de trouver la perle rare qui séduira dans quatre ans l'électeur au vu de son pedigree, mais de trouver tout de suite l'autorité qui saura remettre le parti au travail et contrer le gouvernement sur le terrain du quotidien, et non pas concurrencer vainement le président dans les courbes de sondage. L'opinion publique réelle n'a pas grand chose à voir avec ces sondages commandés par les médias et reste beaucoup plus sensible aux réalités économiques et sociales, ce que le président a parfaitement compris en soutenant la proposition du RSA de Matin Hirsch.
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