Le 25 juillet 1909, Louis Blériot réussissait le premier la traversée de la Manche en avion, à bord de son Blériot XI. D’autres l’ont refait depuis sur le même appareil, ou plutôt des répliques, mais cela reste une performance car il faut un vent pratiquement nul pour que cet “ultra-léger sous-motorisé” soit en mesure de franchir le Channel. Plusieurs appareils vont le faire cet été et une série de commémorations, à Paris et dans la Manche, feront revivre l’émotion de ce moment historique.
Le Blériot XI est visible dans plusieurs musées, dont bien sûr le musée de l’air et de l’espace (MAE) du Bourget et le Conservatoire nationale des arts et métiers (CNAM) où le modèle original est suspendu dans la chapelle, et sera mis en valeur par une exposition consacrée à Blériot du 24 juin au 18 octobre. Le Blériot XI sera aussi présenté au salon du Bourget, qui s’ouvre le 15 juin, dans un stand monté par les élèves de l’Ecole Centrale, avec une numérisation de l’avion sur le logiciel Catia. A l’époque, la conception avait été empirique et Blériot, comme nombre d’autres constructeurs d’avions, était d’abord un équipementier de l’industrie automobile, connu notamment pour ses brevets sur les lanternes, ainsi que pour une superbe moto.
Convaincu très tôt du débouché qui s’ouvrait, Blériot s’était lancé dans le développement et la production de modèles, mettant au point des motorisations plus légères et performantes. Mais il avait perdu beaucoup d’argent sur cette activité et il avait fallu l’exploit de la traversée de la Manche pour susciter un début d’engouement, avec une centaine de commandes du Blériot XI. Le marché décollait, à tous les sens du terme, et en 1911 on comptait déjà 1.350 avions fabriqués dans le monde.
Pionnier du pilotage – il avait reçu le numéro 1 de la licence nationale de pilotage, qui avait été attribuée aux quarante premiers sur une liste alphabétique – il allait aussi devenir un pionnier de la construction aéronautique en lançant une série d’appareils civils, puis militaires. Il fut du reste un des premiers à construire en 1911 un avion de passagers, avec l’Aérobus, ancêtre d’Airbus, qui emmenait sept passagers… Un siècle plus tard, l’Airbus 380 qui en emporte 500 a déjà transporté presque un million et demi de passagers depuis son entrée en service il y a un an et demi !
Des anciennes usines Louis Blériot à Suresnes, il ne reste que le fronton en mosaïque, posé devant les structures modernes du centre de recherches d’EADS, le groupe héritier de ce patrimoine à travers les nombreuses fusions de l’industrie aéronautique française. Mais il reste surtout l’esprit commun à l’industrie aéronautique européenne, où le pilotage, le goût du risque et la conception industrielle restent étroitement imbriqués dans la recherche de la performance.
Samedi et dimanche, au meeting aérien de La Ferté Alais, où se retrouvent chaque année les passionnés d’avions anciens rassemblés par l'Amicale Jean-Baptiste Salis, le Blériot XI était là, incroyable de simplicité et de légèreté. Il faut un certain cran pour décoller avec un tel appareil, aujourd’hui comme hier, et cet avion symbolise plus que jamais la réalisation du rêve d’Icare, avec toute la vulnérabilité de l’homme dans les airs. Samedi, justement, le vent était trop fort pour autoriser le décollage du Blériot XI. Il faut souhaiter que le vent soit favorable pour la traversée de la Manche !
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