Le travail de mémoire commencé ici, avec mes amis de l’Amicale Daguet, pour remémorer plus que commémorer l’engagement français dans le Golfe en 1990-91, pour la libération du Koweït, était un exercice un peu intemporel, sans aucun rapport l’actualité, au point que certains proches m’ont reproché de détourner ce blog pour un faire un livre d’Histoire(s) .
Mais les toutes récentes images de drapeaux français à Benghazi et d’hélicoptères Tigre, Gazelle et Puma embarquant pour la Libye ont provoqué un brutal télescopage visuel, prouvant que cette opération Daguet n’appartient pas au passé mais à l’Histoire, dont la France et ses armées continuent à écrire des pages avec une belle continuité
(au-dessus à gauche : photo Suhaib Salem, Reuters; ci-contre, photo Mer et Marine).
Suite à un échange il y a un an avec le général Roquejeoffre, qui avait abouti à une interview, puis à la publication de mes propres souvenirs, je m’étais laissé entraîner dans une ronde d’évocations, un témoignage suscitant l’autre, avec une grande liberté de parole et de ton des acteurs interrogés, contribuant à une série d’évocations sur les blogs et dans la presse étrangère.
Les anciens chefs de corps de l’époque, alors colonels, Barro (1er Spahis), Derville (2e REI), Thorette (3e RIMa), Manet (6e REG), Ladevèze (5e RHC), le général Amberg pour la composante air, le général Janvier pour la composante terrestre, le ministre Pierre Joxe, mais aussi les photographes Bernard Sidler et José Nicolas, l’aumônier le père Kalka, c’est toute une mine de souvenirs que j’ai prospectée, recueillant des témoignages écrits, des notes, des propos oraux. Des récits de chaque volet du combat, chacun ayant une vision spécifique (à droite, photo 3e RHC).
D’autres sont en cours de validation, le récit du colonel Larocque Latour (3e RHC), celui du journaliste Yves Debay… Ce ne sera malheureusement pas un inventaire exhaustif, car je ne serai pas arrivé à joindre tous les protagonistes ou témoins principaux. idéalement, il me resterait à faire parler le général Ivanoff (1er REC), l’ancien patron de l’artillerie Novack, le service de santé des armées… Mais je sens bien que je suis pratiquement arrivé au bout de l’exercice. L’Amicale Daguet s’est fondue dans la FNAME (Fédération des anciens des missions extérieures), les images du Golfe s’estompent dans le vent de sable.
Simultanément, nombre de régiments ont organisé des retrouvailles d’anciens et j’ai eu la chance d’assister à la cérémonie d’attribution de l’inscription “Koweït 1990-91” sur les drapeaux et étendards des unités engagées dans Daguet, ainsi qu’au rassemblement du 1er Spahis à Valence.
Je n’ai pas pu assister à l’inauguration du monument du 4e Dragons, avec un char rappelant l’engagement de ce régiment, mais j’ai reçu les photos de la cérémonie avec le colonel Bourret et ses anciens accueillis par les Dragons d’aujourd’hui (à droite et au-dessous, photos 4e Dragons).
Déjà l’Afghanistan, où la valeureuse Gazelle à missile antichar Hot continue à faire merveille à côté du Tigre canon et Caracal (version la plus évoluée du Puma), montrait combien l’expérience de la guerre du Golfe restait présente dans les savoir-faire opérationnels français.
L’actualité la plus récente, ces images de porte-aéronefs emportant des hélicoptères comme en août 1990, permet cependant de se poser une question : pourquoi l’institution a-t-elle été si discrète sur un événement qui avait été aussi populaire à l’époque ? Le consensus manifesté ces dernières semaines en France sur l’implication de la France dans la crise libyenne et sur le retour à une politique arabe de la France prouve bien que le sujet est resté vivant, et que le risque réel n’était pas de commémorer l’événement, mais de ne pas le faire. Une occasion perdue, dommage !
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