Les feuilles mortes se ramassent à la pelle, écrivait Prévert, chantait Juliette Greco, chantait Yves Montand, chantaient tant d’autres après eux… Elles tombent chaque automne, comme autant de pense-bête qui rappellent les souvenirs lointains. Une promenade au milieu des feuilles mortes qui crissent sourdement, c’est comme une évocation muette et tellement musicale.
Comme beaucoup de parcs parisiens, le parc de Saint-Cloud, déserté par ses promeneurs avec le froid et la pluie d'automne, est un refuge apaisant dès que le soleil perce la brume matinale. Allées immenses où la lumière presque hivernale et basse étire les arbres jusqu’à en faire des ombres immenses sur le sol, et se reflète dans la fine couche de perles d’eau déposée sur l'herbe par le brouillard.
Contrairement à la légende, les feuilles ne sont mortes qu’une fois entassées sur le sol, ou cachées entre les touffes d’herbe. Quand elles se détachent des arbres, elles sont encore bien vivantes et volent par centaines au premier coup de vent, tranquilles, légères, jamais dans le même sens.
Jeux de lumière surprenants, feuilles d’or qui habillent d'une touche de luxe toute l’étendue du parc, le spectacle ne dure qu’un instant, ou quelques jours à peine, le temps que ces pétales d’arbre tombent et se confondent avec la terre humide. La pluie d’or est une richesse éphémère qu’il faut savoir cueillir à temps.
Bien sûr tous les arbres ne se dépouillent pas à la même date, et l’automne se succède à lui même pendant plusieurs semaines : certaines allées sont déjà bordées par des rangées sévères d’arbres entièrement nus et gris, alignés au garde à vous pour saluer l’hiver en approche.
Plaisir supplémentaire pour le joggeur solitaire, en semaine les gardes forestiers font des feux des feuilles et des branches mortes qu’ils ont ramassées. Tout le sous-bois s’imprègne de ce mélange rare où se marient l’odeur de l’herbe fraîche, celle de la terre mouillée et celle du feu de bois… Si avec ça vous n’êtes pas convaincus…
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