Très belle fable contemporaine, le film "En solitaire" qui vient de sortir : un navigateur solitaire qui court le Vendée Globe, rejoint par un passager clandestin embarqué subrepticement aux Canaries, sera amené à un choix difficile entre débarquer clandestinement le clandestin, sur une île ou un rivage, ou affronter la disqualification pour ne pas avoir été solitaire... Dans le film, le héros aura le choix du cœur, le choix solidaire ; mais dans la réalité, aurait-il pu s'affranchir de la mécanique du sponsoring qui fait de ces entreprises sportives de véritables entreprises industrielles ?
Ce n'est pas un film à thèse, et tant mieux. Pas même une mise en cause de ces courses au bout du monde vécues en direct et en 7/24 à travers Internet, les satellites et les médias sociaux, à coups de directs entrecoupés de pubs pour amortir l’investissement ruineux. C'est une classique histoire de mer et de marin, une belle histoire d'aventure qu'il faut lire au premier degré en prenant son plaisir avec des paquets de mer dans la figure, même si toutes les deux images on voit en lettres géantes le logo du constructeur naval DCNS. Mais DCNS était le nom du bateau de compétition, réel, que la production a racheté pour faire le film, et c'est aussi une signature qui symbolise la haute technologie.
Je ne suis pas expert de course croisière et n'ai jamais mis les pieds sur un tel bolide des mers. Mais j'ai été impressionné dans ce film par l'impression permanente de vitesse d’un bateau qui plane sur les vagues, quoique n'étant pas un multicoques. Une impression de vitesse qui donne au récit un rythme haletant, avec en fond sonore, permanent, le bruit du vent.
Un spécialiste m’a dit avec une moue dédaigneuse que l’intrigue ne valait pas grand chose. Peut-être que l’histoire se traîne un peu, avec des rebonds annoncés et prévus. Mais n’est-ce pas aussi une façon de restituer le fait que, malgré la vitesse du voilier, le temps est très long sur un bateau qui fait le tour du monde sans escale ?
Bon public, j’ai accroché, apprécié chaque détail, surmontant les grimaces de François Cluzet, appréciant le naturel des autres protagonistes, à commencer par le jeune Mauritanien joué par Samy Seghir. Mais le héros central reste la mer, et le duel sans répit du bateau et des vagues.
Et puis derrière l’histoire, il y a l’histoire l’histoire de l’histoire, le “making of” découvert sur “Voiles et Voiliers” qui m’a donné envie de voir le film, cette aventure d’un voilier sur lequel avaient embarqué dix-huit personnes entre les acteurs, le réalisateur, le skipper, l’équipe technique et jusqu’aux maquilleuses pour les raccords… Tous clandestins, finalement, puisqu’on ne les soupçonne pas tout au long du film. Et avec le plaisir, après avoir vu le film, d’aller voir le journal de bord des acteurs, du réalisateur Christophe Offenstein, du skipper Alex Pella, en séquences vidéo sur Internet. Une aventure, une vraie !
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