Nethuns est le nom étrusque du Neptune romain, le dieu de la mer que les Grecs appelaient Poséidon et qui de toutes façons est le même : c’est le dieu de la Méditerranée, imprévisible et capable de colères violentes qui retombent aussi vite qu’elles sont montées. Et comme il a entendu que ses collègues d’Armorique et autres mers froides avaient manifesté leur mauvaise humeur avec violence, Nethuns a rejoint le mouvement, question de prestige.
Le signe avant-coureur, c’est le ciel qui se cache, avec une cavalcade de nuages sombres et bas sur l’eau. Beaucoup plus impressionnant qu’en Manche ou Atlantique, ici en Méditerranée tout est plus théâtral, avec plus de mise en scène. Les iles de l'archipel toscan disparaissent d’un coup de la vue, même les plus hautes comme l’Elbe.
La mer se strie d’abord de moutons pressés qui se bousculent. Puis elle se creuse, la houle s’étire en grossissant. Sauf les ferries qui sortent du port de Piombino quel que soit l’état de la mer, protégés par leur taille et la puissance de leurs moteurs, les bateaux disparaissent de la surface : petits chalutiers, barques de pêcheurs, plaisanciers à voile ou à moteur, tous se serrent dans les ports, amarres renforcées. Dans le petit port de Salivoli, le vent gronde et les haubans font une symphonie frénétique en battant contre les mats en métal, tandis que les vagues se fracassent contre la jetée, qu’elles arrivent à sauter parfois dans des gerbes spectaculaires.
La mer change de couleur: gris bleu au large, avec des stries d’écume, elle devient verte puis gris marron au bord, là où les vagues soulèvent le limon du fond en arrachant les algues qui se déversent en gros tas sur les plages. Les plages ouvertes au large, à vrai dire, il n’en reste pas grand-chose : sable soufflé par les rafales, vagues qui submergent les criques et s’aventurent loin sur le rivage, un spectacle rare dans une mer qui ne connaît pas les marées.
Ce soir Nethuns est allié au vent du sud-ouest, un Libeccio. Contrairement au Mistral, qui pousse un air froid et nettoie le ciel, le Libeccio s’accompagne souvent de gros nuages déversant une pluie sale de poussière, avec un air plus doux même en hiver. Dans trois jours tout sera fini, les dieux seront apaisés. C’est ce qu’annonce la météo, elle même un art divinatoire souvent incertain.
Ce n’est qu’ensuite que les promeneurs, pêcheurs et sportifs pourront s’aventurer à nouveau au bord d’une mer calmée, sans risque de se faire enlever par une lame, et que l'archipel toscan réapparaîtra comme par enchantement. Une petite pensée tout de même pour ceux qui gardent la veille, pilotes, secouristes, sauveteurs et autres corps de métiers courageux mobilisés par les intempéries, prêts à braver les colères de Nethuns.
Magnifique ! Mais il manque une photo de verre ! ;)
Rédigé par : Popbayle | 31 décembre 2013 à 06:01