Moins célébrés en ce soixante-dixième anniversaire des combats pour la libération de la France, ceux de la campagne d’Italie furent pourtant essentiels aussi bien pour la libération de la France que pour la restauration de la démocratie en Europe, et les musulmans de l’armée d’Afrique y payèrent un très lourd tribut.
Trois nécropoles furent créées à la fin de la guerre à Venafro, Monte Mario et Miano, pour regrouper les tombes de ces 7.000 soldats du corps expéditionnaire français (CEF), commandé par le général Juin, et tombés entre novembre 1943 et juillet 1944, en remontant de Naples jusqu’à Sienne et en contribuant de façon décisive à l’avancée des troupes alliées face à une résistance tenace des troupes allemandes. Outre ces 7.000 tués, le CEF a compté 23.500 blessés et 2.100 disparus dans cette campagne d’Italie.
Si le plus gros cimetière est celui de Venafro qui recueillit les morts des Monts Aurunci, bataille en montagne et dans la neige qui ouvrit en mai 1944 le verrou de Monte Cassino, avec 4.578 tombes dont 3.130 stèles musulmanes, celui de Rome rassemble 1.709 tombes dont 1.142 musulmanes dans un site unique et apaisant, sur le Monte Mario, au milieu des pins, des cyprès et des oliviers. Les noms des combats vont des Abruzzes à la Toscane, du Belvedere et du Garigliano à Sienne et Poggibonsi, et toutes les unités sont ici représentées : 2e Division d’infanterie marocaine du général Dody, 3e Division d’infanterie algérienne du général de Monsabert, mais aussi la 4e Division marocaine de montagne, la 1ère Division française libre motorisée et les groupes de Tabors marocains.
Sous l’ombre des oliviers et des pins parasols, les tombes musulmanes, toutes alignées vers la qibla, la direction de la Mecque, s’alternent en vagues avec les tombes chrétiennes, face à un paysage majestueux qui va des monts de l’Apennin au sud-est jusqu’à la ville de Rome au sud et à l’ouest, face aux routes par lesquelles était arrivé le CEF.
Une majorité des stèles portent le nom, le grade et l’unité de celui qui est enterré là : tirailleur, goumier, spahi, commando, canonnier, maoum, mokadem, infirmier, conducteur, ambulancier…
Les noms européens et arabes révèlent la diversité du CEF, mais un certain nombre de tombes, chrétiennes ou musulmanes, portent la même inscription : inconnu. Enfin un certain nombre aussi sont des tombes collectives, équipages de chars ou d’engins détruits, dont ces cinq maréchaux des logis d’un char carbonisé du 8e RCA, réunis à jamais dans leur tombe collective.
L’endroit est sobre et peu fréquenté, mais très bien entretenu par des jardiniers attentifs qui taillent les massifs au cordeau. Il vaut en tous cas la visite car il raconte une très belle page d’histoire, celle de la France occupée secourue par ses colonies et par l’armée d’Afrique, dont les traditions restent vivaces dans l’armée française : une des opérations menées au Mali en 2013 portait le nom de code de Gustav, rappelant les combats sur la ligne de défense allemande Gustav enfoncée par la 3e DIA, dont la 3 brigade mécanisée de Clermont-Ferrand, qui a constitué la première ossature de la force Serval, est l’héritière.
Pierre, de là où doit se trouver, mon papa, ancien brigadier de la DIA Monsabert te remercie pour ce bel hommage. Mais de là où je suis, je me dis qu'il ne suffira pas à compenser le très mauvais souvenir laissé par les troupes coloniales ( tabors) dans la population civile surtout du côté de Naples
Rédigé par : Passou | 19 février 2014 à 13:21
Merci à toi, Pierre, je me souviens aussi qu'il était spahi. Quant au mauvais souvenir, c'est plutôt en Toscane, après la libération de Rome, que nous avons laissé des mauvais souvenirs : c'était après les batailles éprouvantes de l'hiver autour de Cassino, le commandement a un peu relâché la discipline.
Rédigé par : Pierre | 26 février 2014 à 01:41