Sun Yat Sen, le père de la révolution chinoise, celle de 1910 qui a mis fin à l’empire et instauré la république, habitait à Shanghaï une petite maison rue Molière, dans la concession française, maison modeste mais qui est restée sa résidence même en tant que président, et qui a été conservée telle qu’il l’a habitée, avec ses meubles et ses livres.
Parmi ses livres, une Histoire de la révolution française, en anglais, par Alphonse Aulard, et ses propres œuvres dont “Kidnapped in London”, le récit de son enlèvement comme opposant politique à la Légation de Chine à Londres en 1897, ainsi que ses Vues sur le socialisme. Un grand drapeau symbolise l’unité nationale chinoise, avec un soleil sur un coin de ciel bleu au milieu d’un fond rouge : “Blue sky, white sun, red ground”. Drapeau qui est encore aujourd'hui celui de la République de Chine (ROC) à Taïwan.
Dans cette demeure assez intime, les souvenirs personnels sont mélangés avec ceux du politique, le fondateur de la société de loyauté unie Tong Meng Hui, et de l’homme d’Etat, devenu le président de la république. Un joli portrait de jeunesse de son épouse Soong Ching Ling, montre celle-ci entourée de ses deux sœurs, à sa droite Soong Ai Li, qui épousera un homme d’affaires, et à sa gauche Soong Meï Ling, qui sera la femme de Tchang Kaï Tchek.
Un tableau au style également modeste qui est à l’opposé du sacre de Napoléon montre sa prestation de serment comme premier président de la république de Chine le 1er janvier 1912. Les hommes sont en costume cravate, les cheveux courts, c’est la rupture avec les traditions impériales. L’une de ses premières décisions de président sera précisément de prescrire que les Chinois se coupent la natte traditionnelle, et l’on voit dans une vitrine la photo d’un Chinois se faisant couper la natte chez un coiffeur, à côté d’une vraie natte.
Décision présidentielle également, celle d’ordonner aux Chinois d’utiliser désormais le calendrier solaire, et non plus le calendrier lunaire. Réformateur institutionnel, chef de guerre et organisateur du développement économique de son pays, on voit des photos et des portraits de Sun dans ces trois rôle. Ayant à mener la lutte contre les seigneurs de la guerre qui ont affaibli l’Empire et menacent l’unité du pays, il mène campagne comme chef des armées et se fait prendre en photo en uniforme de généralissime de l’armée et de la marine. Dans une autre vitrine, son petit pistolet 6,35 mm Antonio Errasti qui ne le quittait jamais, car il se savait menacé.
Homme de progrès économique et social, Sun s’est particulièrement intéressé au développement des infrastructures nécessaires au développement économique de la Chine. Des photos le montrent en tournée d’inspection du réseau de la China National Railway Company, on voit aussi des pages de son manuscrit en anglais, “The International Development of China”, où il analyse la nécessité d’attirer et d’encadrer les investissements étrangers.
Ouvert à l’économie de marché, Sun Yat Sen est également sensible aux idées sociales, voire socialistes. Dans une note de 1921 dont on voit une copie, Lénine demande à son ministre des affaires étrangères et successeur de Trotski, Georges Tchitcherine, de prendre plus souvent contact avec Sun Yat Sen. ce dernier échange des lettres avec Adolf Joffé, ambassadeur extraordinaire de Lénine en Chine. et un tableau les voit tous les deux assis en discussion dans le salon de la rue Molière. C’est ce dernier qui, proche à la fois du Guomindang et du parti communiste chinois, sera l’artisan des premiers contacts entre ces deux partis, dont certains se feront dans le même salon de Sun Yat Sen.
Une autre vitrine montre l’uniforme ordinaire, entre terre et vert olive, qu’il avait dessiné lui-même ainsi que sa canne car il était prématurément usé. la maladie l’emportera le 12 mars 1925 à l’âge de 59 ans. La statue près de la sortie est une réplique de la statue en bronze faite par le sculpteur français Paul Landowski, et qui se trouve devant son mausolée à Nankin. Le nombre des visiteurs qui viennent ici témoigne d'une popularité toujours forte, puique même de jeunes mariés s'y font prendre en photo.
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