Le père Richard Kalka, aumônier des troupes parachutistes pendant presque quarante ans, ne m’en voudra pas de ce titre raccourci à l’extrême pour saluer sa dernière initiative : il a publié à compte d’auteur, car la première était épuisée, une deuxième édition de son introuvable et indispensable “Dieu désarmé – Journal d’un curé de campagnes”.
J’ai eu l’occasion, comme d’autres, de parler ici il y a deux ans de la sortie de cet ouvrage insolite, les mémoires d’un aumônier militaire de terrain. Ni baroudeur ni guerrier, un homme de paix et frère de tous les hommes, parcourant inlassablement (et enchaînant les OPEX littéralement sans permissions) tous les théâtres d’opération des armées françaises, accompagnant sa 11e DP (puis 11e BP) chérie mais pas seulement, puisque j’avais eu le privilège de le croiser chez les Spahis pendant la guerre du Golfe.
Mais, je le répète, ce n’est pas un journal de marche militaire, même s’il est le premier à sortir pour le 25e anniversaire de la partie offensive de la guerre du Golfe. C’est un itinéraire spirituel, ou le salut et le moral de l’adversaire et des populations civiles sont aussi importants que ceux des soldats français. Dans une remarquable connivence, du reste, avec ses camarades les aumôniers militaires des cultes protestant, israélite et musulman. Et ce n'est pas un hasard, la postface est du grand rabbin de France Haïm Korsia, ancien aumônier général israélite des armées.
Ce témoignage à multiples facettes (Tchad, Cambodge, RCI, Liban, Golfe, Balkans, Afghanistan) ne se résume pas, il se parcourt comme un cheminement initiatique, avec toujours cette recherche de ce qui dépasse les contingences et de ce qui relie les hommes plutôt que des les opposer.
C’est ce que souligne Mgr Luc Ravel, évêque catholique aux armées, dans sa préface à cette réédition : “…il y a cet homme de Dieu que nous appelons le ‘Padre’, l’aumônier. Sa mission ? Détacher le soldat de l’inoxydable violence. L’extraire du feu sans le séparer du chaos. Le décanter de tout ce qui n’est pas lui pour le rendre à lui-même, home au milieu des masses foudroyées. Dégager avec lui et en lui cette part d’humanité que l’esprit de peur conjugué avec l’esprit de revanche peut recouvrir jusqu’à l’étouffer. Le décontaminer de tout ce que la guerre importe avec elle : de haine, de vengeance, de source angoisse, de terreur abêtissante, d’urgence irréfléchie…”.
Un livre on peut plus actuel dans une guerre contre la violence terroriste aveugle qui se nourrit de la haine et de la peur. Un livre à mettre entre toutes les mains. Mais voilà, petit détail, ce livre se mérite, comme toute quête initiatique : il ne se trouve pas en tête de gondole à la FNAC ni sur Amazon, ni chez le libraire du coin. Il est en cartons dans le presbytère du père Kalka, vendu à prix coûtant (16 € + frais de port soit 19,80 € port compris) et il suffit de lui écrire : Père Richard Kalka, Caillau, 09700 Saverdun / [email protected]
Dieu désarmé – Journal d’un curé de campagnes. Richard Kalka, 27 photos, 220 pages.
Pierre, merci pour ce billet: suite à ton billet précédent, j'ai acquis et lu avec passion cet ouvrage, que j'ai ensuite offert. J'en avais laissé le commentaire suivant: "Le témoignage du Père Kalka est un océan de lumière, truffé d'anecdotes, de détails qui restent dans l'ombre des opérations militaire. Avec son oeil d'homme et sa foi et sans perdre son esprit critique, il vit chaque campagne différemment, replaçant l'homme en son centre. Ce livre fait un bien fou."
Rédigé par : So | 12 janvier 2016 à 15:06