Contrairement à Christophe Colomb, Napoléon Bonaparte n’est jamais venu à Cuba, même si l’envie chez lui était forte, après Waterloo, de s’établir comme colon en Amérique, comme joliment illustré par une récente exposition à la Malmaison. Toujours est-il que sa présence est forte sur l’île, grâce à l’exceptionnelle collection constituée par un fortuné industriel du sucre.
Julio Lobo-Olavarria, pris de passion pour l’Empereur, avait comme beaucoup de collectionneurs fortunés envoyé partout des agents, pour acheter tout ce qui pouvait l’être sur le sujet, lesquels ont trouvé effectivement des pièces exceptionnelles, Ci-dessus, “la conquête d’Egypte” d’Edouard Detaille, avec à droite un peloton de méharistes, preuve de l’adaptabilité des armées de Bonaparte. Ci-dessous à gauche, Bonaparte à Milan par Andrea Appiani, à droite Bonaparte Premier Consul par Antonio Canova.
Les guides expliquent que lorsque cet industriel du sucre a quitté Cuba au moment de la révolution de 1959, le gouvernement lui a racheté sa collection. Sans doute n’avait-il pas le choix, et n’a-t-il pas fait l’affaire du siècle – c'était mieux qu’une simple nationalisation. Toujours est-il que le gouvernement révolutionnaire a pris la mesure de ce patrimoine et qu'il l'a installé en 1961 dans un bel hôtel particulier rue San Miguel, la “Dolce Dimora”, pratiquement au coin de l’Université de La Havane. La collection est superbement entretenue et valorisée, avec toutes les précautions pour préserver ces trésors et un gardien dans chaque salle. (Détails d’accès et horaires : voir le site de CubAméricas)
Intérêt supplémentaire de ce musée, les objets, sculptures et peintures sont présentés dans leur environnement d’époque, avec tout un mobilier Empire, des lustres et des tapis, sur de très beaux sols en marbre et en carreaux émaillés. Toute une partie est également consacrée aux armes, fusils et armes blanches, aux uniformes, cuirasses, shakos, bonnets et plaques.
L'aigle impérial est partout présent, ici sur le shako d’un officier supérieur du 24e régiment de ligne, là sur une cuirasse, plus loin sur une plaque d'officier de chasseurs à cheval en bronze doré. Alternativement, c'est le N majuscule de Napoléon surmonté d'une couronne impériale, sur un casque de cuirassier.
Deux vitrines évoquent la Grande armée avec des centaines de soldats de plomb, en tête desquels Napoléon et ses maréchaux. Maréchaux qu'on retrouve également sur deux magnifiques tables en marqueterie de marbre, en médaillons disposés en étoile autour de l'empereur, c'est la préfiguration de la place de Etoile à Paris.
Original, ce marbre polychrome de Raffaello Romanelli, de la fin du XIXe, qui montre un Napoléon jeune avec le bicorne légèrement incliné sur le côté. Plus hiératique, un Napoléon Ier en 1812 au faîte de sa gloire, plâtre de l'Italien Renzo Colombo réalisé en 1885, coulé par le bronzier parisien Pinedo.
Une peinture très originale et faussement intimiste de Jéhan Georges Vibert, La préparation du sacre : Napoléon explique au Pape et à ses frères et sœurs leur rôle dans la cérémonie du sacre, sous le regard du cardinal Fesch, oncle de napoléon et son complice de toujours.
Fin du premier vol de l'aigle, c'est l'exil à l'ile d'Elbe : à droite, Napoléon à l’ile d’Elbe en 1814, huile de Robert Lefevre, tableau ayant appartenu à la comtesse Walewska. A gauche, du même auteur, portrait de sa sœur Elise qui sera princesse de Piombino (en face de l’Elbe), de Lucca et grande-duchesse de Toscane. Des peintures et des bustes rappellent toutes les femmes qui ont entouré Napoléon, dont son autre sœur Pauline, l'impératrice Joséphine, Hortense de Beauharnais, fille du premier mariage de celle-ci et femme de Louis, frère cadet de Napoléon et père de Charles Louis Napoléon, futur Napoléon III.
Fauteuils col de cygne, vases de Sèvres, la collection offre une grande richesse de meubles et de porcelaines faits spécialement pour l’Empereur, dont un beau service à café de Sèvres dans la vitrine de la salle à manger.
Après la grandeur, la chute : après Waterloo c'est Napoléon vaincu, symbolisé par l'aigle foudroyé, un bronze du Toulousain Marius Jean Antonin Mercié. Puis la fin à Sainte-Hélène, Les derniers jours de Napoléon, un bronze du sculpteur suisse Vincenzo Vela.
Enfin la Mort de Napoléon, toile de Charles Auguste de Steuben, à côté du masque mortuaire de Napoléon et Le départ des cendres vers la France de Sébastian Mayer concluent cette exposition permanente. Pour ceux qui n'ont pas l'occasion d'aller jusqu'à La Havane, il reste à découvrir l'exposition qui s'ouvre le 6 avril au Musée de l'Armée et jusqu'au 24 juillet : Napoléon à Sainte Hélène - la conquête de la mémoire...
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