Voici une recette simple et goûteuse pour les repas d’été à la campagne. Une recette de mes amis Achuar de Napurak, sur la rive du fleuve Pastaza. Les ingrédients sont : une pirogue, une hache, une machette, une marmite, cinq ou six bananes vertes, sel et piments pour l’assaisonnement.
Prendre la pirogue et gagner la zone habituelle où on chasse le puntish, cette délicieuse larve de charançon. Commencer par repérer une souche ou un tronc de palmier abattu, c’est facile, on se repère à l’odeur pestilentielle qui se dégage de l’arbre en décomposition.
A la hache et à la machette, on dégage des pans d’écorce et de bois dur pour arriver au cœur putréfié, fibreux et rougeâtre et qui dégage une certaine chaleur. Avec les doigts, on commence à fouiller dans cette masse où grouillent beaucoup de petits vers mais ce n’est pas ça qu’on cherche. Ce sont les larves de charançon qui font cinq centimètres et plus et qui se cachent sous la fibre. Un extraire de patience car il faut extraire la bête sans la casser.
Et bien sûr, de même qu’on goûte les fraises ou les cerises au marché, il faut goûter une ou deux de ces bêtes pour apprécier leur fraîcheur. Si elle gigote, c’est qu’elle est vraiment fraîche et il suffit de couper avec les dents son horrible tête noire de charançon pour la calmer. Ensuite on gobe la larve et le corps explose dans la bouche avec un jus rosâtre.
Franchement, ce n’est pas si mauvais. Une fois surmonté l’a priori culturel, le même qu’ont les étrangers qui voient les Français manger des huîtres et des escargots, le goût n’est pas mauvais du tout. Et c’est nourrissant, ce qui est fondamental dans la forêt vierge et encore plus pour un buffet campagnard.
Le travail est lent, il faut une bonne heure pour en réunir une trentaine, qu’on coince ensemble dans une feuille repliée et liée avec une herbe. C’est suffisant pour quatre personnes.
C’est ensuite qu’on va se procurer le palmito. Il s’agit de repérer un palmier de quatre à cinq mètres de haut, de dégager les broussailles autour, de le nettoyer des lianes et de d’enlever les troncs extérieurs car il y en a plusieurs qui entourent le tronc principal. Tout ça à la hache, en coupant le tronc à bonne hauteur.
Quand il est coupé et qu’il tombe, on va attaquer la partie abattue sur le sol en returant l’écorce et les épaisseurs successives jusqu’à arriver au cœur. Là aussi on goûte et c’est délicieux, c’est bien meilleur que le cœur de palmito en boîte de chez Bonduelle ou Daucy. Le tronc coupé reste au sol et servira de réserve à larves pour les prochains.
Ensuite on revient à l’emplacement du pique-nique préalablement équipé d’un feu de trois grosses bûches sur lesquelles on fera bouillir la marmite. Quand l’eau bout, jetez-y les petits paquets de feuilles de cœur de palmier finement haché et fourré de larves entières, ainsi que quelques bananes vertes.
Quand c’est prêt, servir sur de grandes feuilles de bananier en guise de nappe, chacun assaisonne à son goût et c’est très bon !
Le dessert est à chercher autour de cette finca qui sert de relais de chasse, et on trouve de la papaye, des petites naranjillas et même une gousse de cacao. Pour desservir, pliez les feuilles de banane et jetez-les un peu plus loin, les fourmis se chargeront du reste.
Comptez trois bonnes heures de préparation, et bon appétit !
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