Sujet très très marginal, j’en suis conscient, mais néanmoins sérieux, le confinement lié à la pandémie a eu des effets négatifs sur les moteurs immobilisés, je parle spécifiquement des bateaux à voile et à moteur restés sans accès possible du fait de l’interdiction du littoral et des ports. Pour les bateaux laissés en hivernage, la remise en route prévue au printemps n’a pas été possible et nombre de moteurs sont restés sans tourner bien au-delà de ce qui était normalement prévu.
Parti remettre mon bateau à l’eau en mars, j’ai dû faire demi-tour pour préférer un confinement en région parisienne plutôt que sur un rivage italien où on voyait la mer bleue sans pouvoir l’approcher, et n’ai donc pu faire les opérations de maintenance habituelles.
Conséquence, pour mon bateau comme sans doute pour celui de beaucoup de plaisanciers, les sorties en mer une fois l’été venu avec le déconfinement se sont d’abord faites sans problème, puis les pannes sont apparues progressivement : le gazole des réservoirs s’étant détérioré avec le temps, comme c’est désormais normal et habituel avec les carburants qui ne sont plus entièrement fossiles, les dépôts de gomme, substances végétales et autres gouttes d’eau de condensation sont venus ensemble faire tousser et cracher le brave diesel avant qu’il ne s’arrête complètement, en même temps bien entendu que le vent tombait brusquement. Et le jerrycan de réserve n’a rien résolu puisqu’il contenait le même carburant avarié...
Grâce à la radio, à la procédure “panne panne panne” et à l’aimable efficacité de plaisanciers navigant à proximité, la panne s’est limitée pour le bateau (et son équipage) à l’humiliant remorquage jusqu’au port et à l’ultime manoeuvre jusqu’au quai poussé par le Zodiac du port.
Mais ce n’était que le début : débordé par ses trois mois d’arrêt forcé, le chantier naval devait gérér cinq ou six pannes dues au même problème, moteur encrassé et arrêté. Vidange et nettoyage du réservoir, démontage des pompes, injecteurs et autres circuits d’alimentation auraient pu être faits rapidement mais… il manque toujours la pièce détachée que le concessionnaire injoignable pourra fournir à son retour de congés. Sans parler des discussions sans fin pour savoir si les cuves de gazole du port étaient elles-mêmes saines ou pas, l’argument ultime étant qu’il ne fallait pas se ravitailler dans le port de l’île d’en face où c’était bien pire.
L’histoire s’arrête là. Trois semaines sans naviguer en plein été, c’est une préoccupation de riche, il ne faut pas exagérer. Mais l’expérience m’a enseigné que désormais il faut prévoir des immobilisations plus longues que prévu, et on ne sait pas de quel confinement demain sera fait. Bien sûr il y a des additifs qui stabilisent les différents carburants pour une durée relative, et forcément limitée. J’en ai mis partout, y compris dans le réservoir de ma vieille moto de 1974.
N’étant pas mécano ni technicien, je ne m’étendrai pas davantage sur un sujet qui ne peut mettre en relief que mon incompétence, même si je suis paré pour le prochain confinement, avec les additifs nécessaires.
Mais il n’est pas de petit sujet technique et, depuis le remarquable “Traité du Zen et de l’entretien des motocyclettes” de Rober M. Pirsig, on sait que la contemplation des pistons et des culbuteurs peut avoir une réelle dimension philosophique. Voir un moteur s’arrêter en pleine mer est en tous cas une belle occasion de méditer sur l’inconstance du vent, la nécessité de communiquer avec les autres pour demander du secours et la relativité des choses.