Ancien Lieutenant et ancien chef de corps du 17e Régiment du génie parachutiste (17e RGP), le Général d’armée (2S) Thierry Cambournac a prononcé un discours ému en hommage au Général d’armée Michel Roquejeoffre, ancien chef de corps du 17, ancien patron de la Force d'action rapide et commandant de l’opération Daguet en 1990-91, décédé le 18 octobre et aux obsèques duquel le 17e RGP a rendu les honneurs le 23 dans sa ville de Pamiers, garnison du 17.
« Mon général, Il y a 46 ans, au milieu de l’été 1978, vous preniez le commandement du 17° RGP, premier sommet d’une carrière déjà riche mais qui allait encore connaître de magnifiques développements.
Vous aviez rejoint nos armées à l’Automne 1952 lors de votre intégration à l’Ecole spéciale militaire de Saint Cyr. A l’issue de votre scolarité, vous choisissez de servir dans l’arme du Génie. Poussé par un désir d’excellence qui ne vous quittera jamais et animé d’une grande soif de panache et d’aventures vous rejoignez le 17e Bataillon du Génie aéroporté. A peine un an plus tard, vous êtes déployé en Algérie dans le secteur de Djidjelli en petite Kabylie. Vous êtes un chef de section au sang-froid éprouvé. Vous vous distinguez tout particulièrement lors de l’attaque de votre unité en janvier 1958, action pour laquelle vous sera décernée la Croix de la Valeur militaire accompagnée d’une citation à l’ordre de la Brigade.
Vous servez ensuite pendant trois ans au Mali et au Dahomey.
De retour en France vous suivez avec brio la scolarité du brevet technique avant que l’on ne vous confie le commandement d’une compagnie de Polytechniciens. En juin 1973, vous retrouvez avec une immense joie les troupes aéroportées en qualité d’officier supérieur Génie au sein du 1er RHP puis comme chef du bureau opérations du 17e RGP recréé à Montauban en 1974.
Quatre ans plus tard, après un intermède à l’inspection du Génie, vous êtes déjà un colonel connu, remarqué et apprécié au sein de l’Armée de Terre lorsque commence votre commandement à la tête du 17e RGP. Vous héritez d’un régiment encore très jeune, peu connu, peu reconnu devrais-je dire.
Pour la première fois de son histoire, le régiment est engagé au sud Liban au sein de la FINUL, première opération extérieure des armées françaises depuis l’Algérie. Il y acquiert une réputation mondiale dans le domaine du déminage. C’est toujours sous votre commandement qu’un détachement du 17 réussit le rapatriement des ressortissants français et européens mis en danger par les combats entre factions rivales à Ndjamena au Tchad.
Le jeune Lieutenant que je suis alors sous vos ordres découvrira un colonel pour lequel j’ai vite, nous avons tous rapidement, éprouvé une immense admiration. Certes vous saviez être exigeant mais vous aviez surtout cette capacité à faire confiance à vos subordonnés, à les encourager, les guider et les amener à donner le meilleur d’eux-mêmes. Vous étiez un chef animé d’une profonde humanité. Avec votre épouse Marie Josée à vos côtés, vous étiez un couple rayonnant, toujours soucieux du moral de toutes les familles qui découvraient alors les longues séparations dues aux engagements opérationnels. C’est pour lui rendre hommage que nous avions baptisé le bac qui nous permettait de franchir le Chari du nom de Marie Josée.
Comme l’écrira le chef d’état-major de l’Armée de Terre, je cite : « Le colonel Roquejeoffre a porté son régiment à un très haut niveau, comme le prouvent les résultats obtenus en opérations. Sous son commandement, le régiment ainsi que trois de ses compagnies ont été cités à l’ordre de l’armée ». Le moment venu, vous transmettez à votre successeur un régiment aguerri et internationalement reconnu.
Nommé Général quelques années après, vous êtes, en qualité de chef d’état-major, un des créateurs de la Force d’action rapide. Trois ans plus tard vous prenez le commandement de la 7e Division blindée à Besançon.
Les services éclatants que vous rendez au cours de ces années conduisent le gouvernement à vous confier le commandement de la Force d’action rapide le 8 juin 1990, sommet étincelant de votre carrière.
En effet, lorsque, quelques semaines après, éclate la guerre du Golfe, le président de la République vous choisit personnellement pour commander les forces françaises engagées dans cette bataille sous le commandement opérationnel du général Schwarzkopf. Il sait pouvoir compter sur votre professionnalisme pour lui fournir une évaluation fiable de la situation et des combats. Il connait votre rigueur et la confiance absolue qu’il peut avoir dans votre capacité à faire respecter par nos alliés et par nos unités le cadre et les limites qu’il a assignées à l’action de nos forces. Comme l’exige la formule prononcée lors de chaque prise de commandement dans nos armées, vous avez assuré « le succès des armes de la France ».
Cette brillante carrière vous vaudra d’être promu général d’armée, le plus haut grade de nos armées en temps de paix et de vous voir conférer la dignité de Grand-croix de la Légion d’Honneur.
Mon Général. J’ai eu l’honneur et ressenti une immense fierté à servir sous vos ordres et à rester lié par une indéfectible amitié à votre personne. En cet instant, je veux surtout témoigner de la richesse et de la profondeur d’une personnalité rayonnante et ouverte aux autres.
Aujourd’hui les parachutistes accompagnent à sa dernière demeure un frère d’armes qu’ils confient à leur patron, l’archange Saint Michel. Le 17° RGP se souvient de l’un de ses plus brillants chefs. L’Armée de Terre et plus généralement nos armées honorent un grand soldat. La France perd un de ses plus grands serviteurs. »
(Photo dépêche du Midi)