Jusqu’à la pandémie et à ses périodes de confinement, il était de bon ton de condamner les diffusions de films et de séries TV par VOD ou abonnement, pour défendre la survie des cinémas de quartier et d’art et d’essai. Ayant reçu en cadeau un abonnement à Netflix, j’ai appris à l’utiliser sans me laisser envahir et suis ravi d’échanger avis et commentaires avec mes amis. Ci-dessous, juste pour les périodes de vacances, mes quelques préférences dans les rubriques “séries” (attention, c’est chronophage) et “films”, plus maîtrisables…
1 - Feuilletons, dans l’ordre de préférence
Dans les plus anciens, il faut avoir vu les classiques :
- La trilogie Narcos (Narcos Mexico, Pablo Escobar, El Chapo), une somme pour comprendre le mécanisme du narcotrafic entre Colombie, Mexique et USA. Et pour apprendre l’argot latino… De quoi passer au moins trois semaines haletantes en enchaînant épisodes et saisons, pour ne pas perdre le fil.
- Borgen (2010, de Adam Price, avec Sidse Babett Knudsen et Birgitte Sorensen). La série qui a rendu populaire la démocratie à la danoise à travers une Première ministre mère de famille, accessible et spontanée. Un vrai plaisir sur l’ensemble des épisodes, une série devenue une référence dans le discours des politiques en France et en Europe.
J’omets délibérément les séries les plus connues sur le pouvoir politique en France et aux Etats-Unis, que tout le monde connaît, surtout que toutes les fictions sur la Maison Blanche ont été largement dépassées par la réalité. Et que House of Cards se casse la figure après la mort du président, improvisée par les scénaristes car l’acteur qui le jouait a dû être écarté pour des raisons tout autres.
Et parmi les plus récents :
The Crown (Depuis 2016, de Peter Morgan et Stephen Daldry). Fabuleuse série historique qui part de l’accession au trône de la reine Elizabeth II et déroule l’Histoire de la Grande Bretagne, avec une majuscule, autour de l’histoire, avec une minuscule, de la famille Windsor. Au-delà du gossip c’est une analyse très fine des rapports entre la monarchie et le pouvoir politique, entre médias et institutions, et une description certainement très exacte des rapports complexes entre la reine et « ses » premiers ministres. Entre un casting extraordinaire par la ressemblance avec les vrais personnages, la qualité des décors, costumes et accessoires, et la qualité de l’anglais parlé, c’est un plaisir permanent et on attend avec impatience la cinquième et dernière saison, après la belle réussite de la nouvelle 4e. Du coup, on se passionne pour la succession – réelle – de la reine : Charles ou William ? Dans la veine du magnifique film « A King’s speech », que cette série prolonge historiquement
Fauda (Depuis 2015, de Lior Raz et Avi Issacharoff). Production israélienne, l’une des meilleures séries dans le genre policier. Les démêlés d’un inspecteur israélien, membre d’une force d’intervention dans les territoires occupés, avec des Palestiniens parfois caricaturaux mais pas toujours, et des Israéliens parlant arabe et un peu arabisés eux-mêmes, dans un affrontement forcément sans issue.
The Queen’s Gambit (2020, de Scott Frank, etc.). Série américaine plus courte que les autres, dont le succès populaire incroyable est largement mérité avec une histoire bien ficelée, des acteurs attachants, une intrigue facile à suivre mais sans jamais de longueurs.
La Casa de Papel (Depuis 2017, de Alex Pina). Feuilleton espagnol mondialement populaire et très prenant, mais on peut se contenter des deux premières séries. Ensuite, comme souvent les feuilletons, on tire un peu à la ligne, on s’enfonce dans l’invraisemblable et dans le pathos des personnages. Série victime de son succès mondial. Attention, sur Netflix il s’appelle « Money Heist ».
Rise of Empires : Ottoman (Depuis 2020). Remarquable série historique consacrée à Mehmet II et la prise de Constantinople. Scènes d’action et combats reconstitués alternent avec des interventions de spécialistes qui expliquent le contexte sans casser la dynamique. Le narratif n’est jamais forcé, pas de manichéisme même si la production est turque, on voit bien les dissensions au sein de chaque camp.
Carlo and Malik (2018, de Giampaolo Simi et Vittorino Testa). Feuilleton policier italien avec un bon suspense de bout en bout, personnages attachants, on sent l’effort pour décrire la réalité de Rome aujourd’hui. Un Commissaire Montalbano revisité, et replacé dans la capitale et dans l’Italie actuelle, aux prises avec les mafia, la drogue et l’immigration.
Poldark (Depuis 2015, de Debbie Horsfield). Feuilleton historique britannique. Les deux premières saisons sont captivantes, les personnages attachants, mais ensuite l’histoire se perd dans des rancunes de famille et s’essouffle. On peut en rester là…
Homeland (2011-2020, de Gideon Raff, Howard Gordon, Alex Gansa). Très prometteur au début, cet énorme feuilleton autour de la CIA et sa lutte contre le terrorisme international dérape dès la troisième saison, avec les crises à répétition d’une super-agent bipolaire qui carbure aux anxiolytiques et consomme allègrement ses petits copains… A éviter dès la 3e saison.
Parlement Feuilleton français qui se déroule dans les couloirs du Parlement européenne et de la Commission à Bruxelles. Se veut drôle mais ne l’est vraiment pas. Temps perdu.
2 – Films, pour se limiter à une ou deux heures…
Mosul (2020, de Matthew Michael Carnahan). Très beau film sur l’Irak en guerre, où l’on suit une patrouille de forces spéciales irakiennes agissant en francs-tireurs dans la ville de Mossoul détruite à la chasse des éléments de l’Etat islamique. Film dur mais très vrai, avec des acteurs locaux remarquables, violent mais sans manichéisme, avec quelques scènes d'anthologie comme l'engueulade entre le SWAT irakien rebelle et un officier iranien, pourtant du même bord contre Daesh mais que tout oppose.
The Two Popes (2019, de Fernando Meirelles, avec Anthony Hopkins et Jonathan Pryce). Belle réussite de Netflix ce merveilleux face à face entre le pape François et le pape émérite Benoît XVI, tout en nuances, moins drôle que « Habemus Papam » mais beaucoup plus fin et véridique même si le faux Benoît est plus sympathique que le vrai… Un peu dans la veine de « Le métis de Dieux », le dialogue de Mgr Lustiger et de Jean-Paul II, sur des sujets il est vrai plus dramatiques, et qu’on ne trouve malheureusement pas sur Netflix mais sur d’autres sites de VOD.
The life ahead (La vie devant soi, 2020 de Edoardo Ponti). La vieille Madame Risa, qui recueille malgré elle un jeune sénégalais de douze ans qui fait les quatre cent coups, est interprétée une Sofia Loren qui assume son âge et reste une incroyable actrice. Joli film de toutes façons…
Rolling Stones OléOléOlé (2017, Paul Dugdale, avec les Stones) La tournée des Rolling Stones en Amérique latine, fabuleux documentaire où l’on perçoit l’incroyable vitalité de ce groupe mais aussi l’émotion de tous ces fans réprimés par des régimes autoritaires, du Brésil à l’Argentine, le Chili, le Mexique et Cuba, lors des premiers succès des Stones. A voir et à revoir !
Sully (2016, de Clint Eastwood avec Tom Hanks) l’histoire vrai de Sully Sullenberger, le pilote de l’Airbus A320 dont les deux réacteurs se sont arrêtés au décollage en heurtant un vol de canards, et qui a réalisé l’exploit insensé d’amerrir sur l’Hudson glacé en janvier 2009, contre l’avis de tous les contrôleurs aériens, en sauvant la totalité des passagers.
Unorthodox (2020, de Anna Winger). Plongée dans une communauté yiddish de New-York, très repliée sur elle-même, à travers « l’évasion » d’une jeune femme. Intéressant et bien vu, c’est un film allemand d’une grande finesse.
Hostiles (2018, de Scott Cooper). Western américain remarquable, personnages très crédibles, un très bon moment. Ne figure pas chez Netflix mais vaut le détour, il est disponible en VOD.
Van Gogh : At Eternity’s gate (2019, de Julian Schnabel). Film sombre, comme le personnage, très coloré, comme sa peinture, qui nous entraîne dans sa folie progressive. On voit le monde à travers le regard du peintre ébloui par la lumière et on comprend d’autant mieux son œuvre.
Gauguin – Voyage de Tahiti (2017, de Edouard Deluc). Le pendant de Van Gogh, évidemment. Également sombre comme son existence finalement solitaire et meurtrie, colorée comme les paysages océaniens, déprimant comme il était dépressif, ce film offre lui aussi une belle plongée dans l’art de ce peintre qui peint d’abord pour lui – et sacrifie sa vie de père de famille à la peinture – sans chercher à suivre les canons de la réussite. Beau cheminement le long de son parcours loin de tout, très éclairant sur son œuvre, magistral Vincent Cassel.
The Outsider (2018, de Martin Zandvliet). Un Yankee chez les Yakusas. Superbe policier qui fait pénétrer le monde des gangs japonais, les Yakusas, sans exotisme et sans doute très documenté. Film d’action et de suspens, violent sans excès, un très bon moment.
Under the bombs (Sous les bombes, 2008, de Philippe Aractingi). Pas récent mais très beau film car tourné sur place en mêlant fictions et documents d’actualité. Film émouvant comme beaucoup de films libanais et qui évoque bien, de façon malheureusement intemporelle, les drames permanents du Liban.
Un peu, beaucoup, aveuglément (2015, de Clovis Cornillac, avec lui-même et Mélanie Béranger). Jolie comédie française pour passer une soirée détendue, film drôle à voir même en famille…
Cette sélection n’est pas arbitraire, elle est totalement subjective. C’est juste pour indiquer qu’en cherchant on trouve des choses très bien sur Netflix, à condition d’oublier la rubrique “Trending” et d’utiliser l’outil de recherche (la petite loupe à droite dans la barre du haut). Il y a une foule de films espagnols et latino-américains qui sont excellents et qu’on ne trouve sinon que dans les salles d’art et d’essai. De très bons films italiens (mais le choix est inégal), israéliens, égyptiens, libanais, on peut vraiment faire le tour du monde sans violer le confinement… Et pour ceux qui veulent faire des cadeaux, les promotions nombreuses (Black Friday, soldes, Noël…) offrent des coffrets complets de “Engrenages” ou “Le bureau des Légendes” à ne pas rater